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La réforme de la Gestion Budgétaire par Objectifs en Tunisie - Leçons tirées

11 juin 2018
Rym Kanzari Ep Gabsi, Adil Ababou

A la suite de sa participation au séminaire CABRI « S’approprier et diffuser la réforme budget-programme », Rym Kanzari Ep Gabsi, directrice au sein de l’unité GBO du Ministère tunisien des finances, partage dans ce blog son expérience dans la mise en œuvre de la réforme budget-programme.

Rym Kanzari Ep Gibsi Waemu Workshop
(Photo by CABRI)

C’est à la suite de l’insertion d'un article unique (Article 11) au niveau de la Loi Organique du Budget (LOB) de 2004 que la réforme budget-programme, appelée "Gestion Budgétaire par Objectifs (GBO)" a été initiée. Cet article prévoit que "la loi de finances peut autoriser l’affectation des crédits selon des programmes et missions. Les programmes comprennent les crédits [...] en vue d’atteindre des objectifs déterminés et des résultats pouvant être évalués. Les missions comprennent un ensemble de programmes concourant à concrétiser une stratégie d’intérêt national. Les programmes et missions sont fixés par décret". 

Cet article, une initiative de l'administration Tunisienne pour la modernisation de la gestion des finances publiques, a permis d’encadrer la réforme progressive de la GBO.

Cinq objectifs distincts pour la réforme GBO
  1. Rendre les politiques publiques, traduites par des programmes, transparentes et compréhensibles par tous et spécialiser les crédits budgétaires par programmes. 
  2. Orienter la gestion publique vers une logique de résultats en se basant sur des objectifs (traduisant les priorités des programmes publics) et des indicateurs de performance permettant de juger de la performance des programmes publics.
  3. Appuyer la responsabilité et la redevabilité des gestionnaires et des responsables des programmes publics.
  4. Renforcer la transparence des informations budgétaires et améliorer le contrôle parlementaire.
  5. Assurer une discipline budgétaire globale : la conformité du budget et des cadres de dépenses à moyen terme des programmes aux objectifs macroéconomiques.
Les leçons tirées de l’expérience tunisienne

L’Homme d'état, Homme politique et Président Habib Bourguiba (1903 - 2000) soulignait qu’"être réaliste, c'est préférer une reforme modeste, qui en permet une autre, à un miracle impossible". Cette philosophie illustre bien l’approche entreprise pour la réforme GBO qui a été expérimentée par vagues de ministères de 2013 jusqu'à 2017, jusqu’à la présentation et exécution de l’ensemble du budget 2018 par programmes. 

Une spécificité de l’approche tunisienne réside en ce que la réforme GBO, nécessitant une adhésion large des départements, a pu être mise en place bien que la nouvelle LOB devant en instituer les principes de base ne soit pas encore votée (celle-ci a été transmise au parlement en novembre 2015). 

L’expérience tunisienne en matière de budget-programme a permis de tirer les cinq leçons suivantes :

1. Bâtir un consensus sur les objectifs et les composantes de la réforme en vue d’assurer l'adhésion et l'appropriation des acteurs concernés.

A cet effet, la Tunisie a utilisé un schéma directeur de la réforme GBO, validé initialement dans le cadre d'un conseil interministériel en 2010 puis actualisé en 2013. Ce schéma directeur a été décliné en un synoptique de mise en œuvre qui a été présenté aux départements ministériels. 

2. Préparer les acteurs concernés aux changements induits par la réforme et se préparer à communiquer sur ses avantages.

L'élaboration de plans de communication et de formation (internes et externes à l’administration) dédiés représente un outil d’autant plus efficace que leur mise en œuvre suivra un planning clairement défini au préalable. 80 formateurs GBO au niveau central et déconcentré ont été formé, ayant vocation à apporter un soutien à la fois sur les volets initiation et professionnalisation. Ces formateurs sont les relais du ministère des finances au niveau ministériel et apportent assurent une formation continue adaptée aux besoins des ministères.

3. Construire son propre modèle et conduire sa propre réforme.

Malgré la valeur ajoutée de l’apprentissage entre pairs, la Tunisie a cherché à mettre en place son propre modèle de budget-programme, adapté aux spécificités de l'administration nationale. Cette adaptation a été largement facilitée par l'expérimentation en 2013 par vagues de ministères, sur la base d’un protocole d'expérimentation définissant les engagements de chacun ainsi que les étapes à franchir chaque année. Cette expérimentation s’est appuyée par une circulaire du chef du gouvernement qui définit les composantes de la réforme GBO. La réforme sera généralisée à tous les ministères en 2018 malgré l’absence de nouvelle loi organique.

4. Instituer un système de gouvernance propre à la réforme qui soit à la fois stratégique et opérationnelle.

Le pilotage stratégique de la réforme GBO est conduit par un comité interministériel dédié, présidé par le chef du gouvernement en présence de tous les ministres sectoriels, qui se réunit en moyenne deux fois par an. Le lien entre pilotage stratégique et gouvernance opérationnelle est assuré par un comité de suivi du projet auprès du ministre des finances. La gouvernance opérationnelle de la réforme est principalement assurée par l'unité GBO centrale chargée du pilotage interministériel du projet de la réforme ainsi que les unités GBO sectorielles. Des groupes de travail réunissant les représentants des principales structures concernées sont tenus de produire la documentation technique. Enfin, des réunions périodiques des comités des directeurs des affaires financières et des responsables de programmes, tenues sous l'égide du Secrétaire Général du ministère des finances, permettent d'échanger sur les difficultés de mise en œuvre de la réforme GBO. 

5. Eviter que la réforme soit pensée et mise en œuvre exclusivement au niveau central.

Bien que la plupart des programmes publics soient pilotés au niveau central, leur mise en œuvre se fait au niveau déconcentré, ce qui suppose d’en définir la déclinaison opérationnelle dès la conception de la réforme. Cette question de la déclinaison opérationnelle des programmes a été mise en avant depuis 2014 en Tunisie, mais les pistes concrètes de mise en œuvre n’ont commencé à être dessinée que fin 2017, ce qui supposera des efforts de rattrapage supplémentaires.

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